Des innovations inspirées par des Hommes : l’expérience de legal design d’Atos
Nous sommes nombreux à sentir que notre façon
de penser l’entreprise et le management ne correspond plus ni à notre temps ni
à nos attentes. Plusieurs méthodes pour faire
fonctionner les organisations ont été expérimentées et semblent avoir atteint
leurs limites et parfois même, ces tentatives vont contribuer au problème plus
que le résoudre. En octobre 2018, chez Atos nous avons débuté une expérience
unique favorisant une autre façon de travailler ensemble dans un modèle
d’organisation porteur de sens où les collaborateurs étaient libres d’exprimer
pleinement leurs potentiels.
Cette expérience, toujours en cours, a été menée au sein de la direction juridique du groupe Atos. Le juriste en 2018 doit s’ouvrir de plus en plus aux autres disciplines et travailler de manière plus collaborative avec les autres parties prenantes de l’entreprise, pour continuer à comprendre et répondre à leurs différents enjeux mais aussi au standard plus élevé de clarté et d’accessibilité pour tous des contenus juridiques. Or pour rendre possible une compréhension collective de problèmes complexes, qu’ils soient juridiques ou non, il convient de mettre en place des dispositifs de communication, particulièrement de visualisation, par lesquels l’apprentissage s’opère et se diffuse.
Il est une évidence qu’en matière de traitement de l’information tous domaines confondus, l’information purement technique est devenue une commodité, ce qui compte c’est la clarté qui rend le pouvoir à l’utilisateur.
Aussi, plusieurs collaborateurs d’Atos ont
participé pendant deux journées à un « Ideation Sprint » et expérimenté comment
le design pouvait rendre les services rendus par les juristes plus
exploitables, plus utiles et plus attrayants.
Par le biais
d’un processus de création sous contrainte temporelle, l’idéation consiste à
penser un problème d’une manière globale et variée. Ce processus permet de
trouver une multitude d’idées hétéroclites avant de retenir celles qui seront
destinées à former des prototypes et être soumises à des phases de tests auprès
de plusieurs populations dans l’entreprise.
Au départ, des anthropologues sont venus en
amont pour étudier la « tribu » des juristes d’Atos dans son environnement et
l’observer dans ses interactions avec les autres acteurs de l’entreprise. Tout
est parti de ces derniers que doivent servir les juristes et de la
compréhension de leur identité, leurs besoins, aspirations mais aussi de leurs
contraintes et de leur parcours en tant qu’utilisateurs des services juridiques.
Il était crucial que l’exercice ne soit pas une introspection des juristes.
La matière première produite par l’étude de
cet écosystème et des attentes de chacun a ensuite été coscénarisée, à
l’occasion d’un brainstorming de deux jours mené par l’agence InProcess qui
partage le désir d’utiliser des méthodes scientifiques centrées sur l’humain
pour innover et accélérer la croissance des entreprises. Les thèmes retenus portaient sur l’allocation du temps, le knowledge
management, la transparence de l’information, le choix des bons canaux de
communication et enfin les KCP (key contracting principes) du groupe Atos.
Le processus est simple : les participants
inscrivent sur des Post-It dans le cadre d’ateliers de courtes phrases qui
résument leurs principales attentes, avant de partager leurs sentiments sur ces
propositions. Ensuite, un designer illustre pour chaque groupe les phrases dans
un langage universel, susceptible d'être repris par toutes les fonctions
d’Atos. On passe de la peau de l’anthropologue à celle du designer pour
réaliser des scénarios idéaux. Ces scénarios sont ensuite testés dans le but de
créer de véritables cahiers des charges et des articulations quotidiennes au
sein du département juridique. En effet et c’est essentiel dans cette démarche,
l’expérimentation est la règle et les équipes ont rapidement prototypé,
identifié ce qui ne marche pas, ajusté et recommencé.
La particularité de cette démarche est d’être par construction collaborative et pluridisciplinaire. Ainsi, juristes, designers, chercheurs co-créent avec et au service de l’utilisateur. En outre, il est intéressant de noter que l’utilisation de supports visuels donnent à leur auteur une image innovante à un moment où dans les organisations l’innovation, à travers l’automatisation et l’intelligence artificielle, peut revêtir un caractère anxiogène.
Les ateliers qui se sont déroulés ont démontré qu’en remettant l’individu au centre de tout et en effectuant un véritable changement de paradigme, en passant d’un centre de profit à un centre d’expériences favorisé par le métissage des équipes, on pouvait transformer le rapport au travail. Enfin, ce recentrage autour de l’humain offre une double opportunité pour les directions des ressources humaines. D’une part, de pouvoir se transformer elle-même certainement encore plus naturellement que les autres fonctions de l’entreprise, mais plus encore de faciliter les mutations des autres parties prenantes en reprenant la main sur sa raison d’être, à savoir l’Humain dans l’entreprise.
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Découvrez le dossier #Innovation managériale : les RH osent la créativité dans le numéro de nov.-déc. 2018 de la revue Personnel de l'ANDRH. Avec les contributions de Bénédicte Crété Dambricourt, DRH de Groupama, de Géraldine Eyraud, DRH du réseau familial ARaymond, de Fabien Blanchot et Éric Campoy, codirecteurs de la chaire Confiance et management, université Paris-Dauphine-PSL, David Autissier et Jean-Marie Peretti, Chaire ESSEC Changement et Chaire ESSEC Innovation managériale et Excellence opérationnelle, d'Aline Crépin, co-animatrice de la Commission nationale Égalité professionnelle et Diversité de l’ANDRH etc.