Article issu de notre magazine (numéro 610 mai 2021)
Le télétravail s’affiche comme un thème de négociation majeur dont l’encadrement juridique était pourtant peu précis. C’est pourquoi de nombreuses attentes concernaient l’ANI 2020.
Celui-ci est resté de l’ordre de la simple préconisation en se construisant certes comme un appui pour les négociations mais ne présentant que peu d’innovation.
Voici quelques éléments clés d’un bon accord de télétravail.
Même si une charte unilatérale peut être mise en place, la réussite de ce dispositif repose sur l’équilibre entre sa valeur ajoutée (motivation, productivité, réduction des temps de trajet, etc…) et ses risques et contraintes (isolement social, séparation des temps de vie, changement de culture du management, etc…).
Ceci peut être fait en instaurant une quotité de jours en télétravail plutôt qu’imposer des jours fixes, permettre d’être en télétravail dans un autre lieu que la résidence principale, autoriser l’utilisation de tous les moyens de communication (y compris la messagerie instantanée de l’entreprise) pour les demandes de passage en télétravail « d’urgence »…
Ceci permet de garantir le bon fonctionnement du dispositif aussi bien concernant les aspects d’organisation du travail que de santé et sécurité.
Constituer une commission de suivi de l’accord télétravail
Cette commission aurait des moyens, un rôle défini et une composition paritaire qui assurera la bonne application du dispositif via la fixation d’objectifs à moyen et long terme. Elle réaliserait a minima un bilan annuel.
Faisons également le point sur quelques éléments trop souvent oubliés dans les accords de télétravail...
Les accords ont tendance à définir deux typologies de télétravail : le télétravail régulier et le télétravail occasionnel. Il ne faut pas omettre le télétravail flexible qui concerne les demandes exceptionnelles de passage en télétravail. Définir toutes les modalités de télétravail c’est l’assurance du respect de l’équité de traitement entre les salariés !
De manière prépondérante, les accords observés présentent clairement les critères d’éligibilité du poste et du salarié mais les critères d’inéligibilité du poste et du salarié sont souvent oubliés. La méthode ANACT est un outil efficace pour limiter les décisions arbitraires concernant l’accès au télétravail.
Prévoir une période d’adaptation et prévoir une clause de réversibilité : le salarié doit pouvoir revenir dans les locaux si les conditions d’exercice du télétravail ne sont pas satisfaisantes.
Etablir une enveloppe de prise en charge des frais d’installation, des frais professionnels et des frais annexes liés au télétravail.
La notion de lutte contre l’isolement des salariés en situation de télétravail est très souvent présente dans les accords. Mais qu’en est-il de la lutte contre l’isolement des salariés ne souhaitant pas ou ne pouvant pas être en télétravail ? De même, il ne faut pas oublier que le risque associé à l’exercice du télétravail doit être pris en compte dans le DUER.
Le télétravail se déploie, mais quid du déploiement des moyens et outils relatifs à l’exercice du droit syndical ?
Mettre en place le télétravail sans questionner l’organisation du travail
La réflexion sur les réaménagements des locaux doit être menée avant toute négociation sur le télétravail. Pour ce faire, les IRP doivent être étroitement associées à cette étape préliminaire. Il faut commencer par établir un diagnostic et gagner en pertinence dans les négociations avec la mise en œuvre d’une enquête co-construite entre direction et représentants du personnel.
Stigmatiser les salariés ayant des besoins spécifiques en imposant le télétravail
Le télétravail peut avoir des répercussions autant positives que négatives sur la santé des salariés. Pour les travailleurs ayant des besoins spécifiques, il est primordial de ne pas généraliser le télétravail et ses mesures de mise en œuvre mais d’évoluer plutôt dans une démarche individuelle et dynamique.
Négliger la question de l'accès à une connexion internet
L’un des critères d’éligibilité les plus répandu concerne l’accès à une bonne connexion Internet. Fournir une clé 4G/5G à chaque télétravailleur permet ainsi d'assurer l’équité de traitement et lutter contre la discrimination entre les salariés.
Retirer les titres-restaurant aux télétravailleurs
Les conditions de travail du télétravailleur doivent être équivalentes à celles des travailleurs exerçant leur activité dans les locaux de l’entreprise.
Ces listes ne sont pas exhaustives et cette déclinaison de bonnes pratiques sera amenée à s’étendre au rythme du déploiement du télétravail dès lors que celui-ci nait d’une relation de confiance entre les parties prenantes et d’une envie de s’inscrire dans une démarche pro-active et innovante.