Jurisprudence : 6 décisions à ne pas manquer pour sécuriser vos pratiques RH
Diplôme mensonger & licenciement
Un salarié peut-il être licencié pour faute grave après avoir menti sur l’obtention d’un diplôme nécessaire pour occuper son poste ?
❌NON. L’employeur qui n’a pas vérifié les diplômes requis à l’embauche, ne peut invoquer leur absence pour justifier une faute grave. En l’espèce, une collaboratrice avait été embauchée comme préparatrice en pharmacie, un poste pour lequel la détention d’un diplôme spécifique et d’une autorisation préfectorale était obligatoire. Pendant plusieurs années, l'employeur n’a jamais vérifié l’obtention du diplôme requis. Ce n’est qu’à la suite d’un contrôle de l’ARS que l’employeur découvre l’absence de diplôme, et engage une procédure de licenciement de la salariée pour faute grave. La Cour de cassation a estimé que l’employeur ne pouvait invoquer une réglementation à laquelle il avait lui-même contrevenu, et se prévaloir de sa propre négligence pour reprocher à la salariée une faute grave.
Référence : Cass. soc., 26 mars 2025, n°23-21.414
Contestation de l’avis d’inaptitude & licenciement
L’employeur peut-il poursuivre une procédure de licenciement malgré une contestation de l’avis d’inaptitude en cours ?
✅OUI. La contestation de l’avis d’inaptitude n’interdit pas à l’employeur de poursuivre la procédure de licenciement.
En l’espèce, un salarié, embauché depuis 1 an, est déclaré inapte par le médecin du travail, avec impossibilité de reclassement. L’employeur engage une procédure de licenciement. Le salarié saisit le conseil des prud’hommes pour contester l’avis médical. Malgré cette contestation en cours, l'employeur finalise le licenciement. La Cour de cassation rappelle que la rupture du contrat de travail en raison de l’inaptitude du salarié, régulièrement constatée par le médecin du travail, n’est pas conditionnée à la décision préalable du conseil des prud’hommes sur le recours formé contre l’avis de ce médecin.
Référence : Cass. soc., 19 mars 2025, n° 23-19.813
Indemnité de licenciement & temps partiel thérapeutique
L’employeur peut-il calculer l’indemnité de licenciement sur la base d’un salaire réduit par un temps partiel thérapeutique ?
❌NON. L’indemnité de licenciement doit être calculée sur la base du salaire antérieur, c’est-à-dire avant le passage au temps partiel thérapeutique.
En l’espèce, une salariée en temps partiel thérapeutique depuis mars 2017 est placée en arrêt maladie en avril 2018. Elle est licenciée 2 ans plus tard pour inaptitude et impossibilité de reclassement. Pour fixer l’indemnité de licenciement, l’employeur s'était basé sur son dernier salaire, c’est-à-dire celui perçu pendant son temps partiel thérapeutique. La Cour de cassation rappelle que l’employeur aurait dû se baser sur le salaire perçu avant le passage à temps réduit.
Référence : Cass. soc. 5 mars 2025, n° 23-20172
Rémunération & lien familial avec l’employeur
L’employeur peut-il justifier une rémunération plus avantageuse en invoquant des liens familiaux avec un salarié ?
❌NON. Le fait d’appartenir à la famille de l’employeur ne peut justifier un traitement salarial plus favorable.
En l’espèce, une collaboratrice parlementaire, titulaire d’un Bac+5 et avocate de formation, découvre que l’épouse de son employeur, sans diplôme, ni expérience équivalente, perçoit 1 500 € de plus par mois, en plus de 26 400 € de primes sur 4 ans. L’employeur explique que son épouse occupait des fonctions plus “sensibles” et se rendait disponible en soirée ou le week-end du fait de leur lien familial. La Cour de cassation vient rappeler à toutes fins utiles que le défaut d'appartenance du salarié à la famille de l’employeur ne peut justifier une différence de traitement en matière de rémunération.
Référence : Cass. soc. 9-4-2025, n° 23-14.016 FSB
Changement de missions & Modification du contrat de travail
L’employeur peut-il confier une mission différente à un salarié sans modifier son contrat de travail ?
✅OUI. L’employeur exerce son pouvoir de direction en adaptant les missions du salarié, à condition que ces nouvelles tâches restent compatibles avec sa qualification professionnelle.
Seuls les changements affectant un élément essentiel du contrat (qualification, rémunération, durée du travail, lieu de travail…) nécessitent l'accord du salarié.
En l’espèce, un médecin, embauché comme chef de service d'un centre d'action médico-sociale précoce (CAMSP) et directeur technique, s’est vu affecter à des fonctions de direction médicale d’instituts médico-éducatifs (IME). Il saisit le conseil des prud’hommes estimant que son contrat a été modifié sans son accord. Les juges rejettent sa demande car les missions confiées relevaient toujours de sa qualification médicale. De plus, il n’a subi aucune perte de responsabilité, ni changement de secteur géographique.
Référence : Cass. soc. 2 avril 2025, n° 23-23783 FD
Procédure & licenciement
Pour calculer le délai entre la convocation à un entretien préalable et l’entretien lui-même, l’employeur doit-il compter le jour de présentation, les dimanches et les jours fériés ?
❌NON. L’employeur doit respecter 5 jours ouvrables pleins entre la présentation de la convocation et la tenue de l’entretien. Le délai commence le lendemain de la présentation de la lettre recommandée, et non le jour où le salarié la récupère, et exclut les dimanches, ainsi que les jours fériés. En l’espèce, l’entretien avait été fixé 6 jours après la présentation de la convocation. Cependant, l’employeur avait compté, à tort, un jour férié (le 25 décembre) dans ce délai. Ainsi, les 5 jours n’étaient pas écoulés. La Cour de cassation a déclaré le licenciement irrégulier, et une indemnité a été versée au salarié.